Quand
je suis arrivé à Puerto Limon, fin août
1909, il y régnait une certaine animation. C'étaient
les élections présidentielles. On voyait des
groupes arrêtés S1J.r les trottoirs ou au milieu
des rues ; les revers des vestons étaient ornés
de boutons bleus ou rouges, les chapeaux enrubannés
de mêmes couleurs. La lutte, circonscrite entre deux
candidats représentant deux partis très distincts,
était fort vive. L'un des candidats, un ancien président
qui fut pendant huit ans un dictateur, était soutenu
par l'évêque, le clergé, et les Américains,
l'autre, président de la Chambre des députés,
étant appuyé par la majorité à
cause de son caractère ferme et intègre, de
son programme d'opposition à la politique d'accaparement
nord américaine. C'est ce dernier, don Ricardo Jimenez
Oreamuno, qui l'a emporté, avec une majorité
considérable. Malgré l'effervescence des esprits,
les élections se sont faites dans le plus grand calme,
avec une régularité parfaite, et les soi-disant
crimes annoncés par la presse des États-Unis
n'ont jamais été commis. Grâce aux efforts
personnels du président, la loi a été
partout respectée, et c'est un des plus beaux titres
de don Cleto Gonzalez Viquez que cette neutralité absolue,
cette liberté complète assurée à
tous, ce respect de la loi, que pourraient lui envier des
nations plus vieilles. Le peuple entier de Costa Rica a donné
là un bel exemple de dignité civique, tandis
que son gouvernement, par son impartialité absolue,
donnait une fière leçon de libéralisme.
*
* *
La
ligne de chemin de fer qui relie Puerto Limon à San
José est longue de 166 kilomètres et le trajet
se fait en six heures. C'est un des plus beaux parcours que
l'on puisse faire; il est comparable à celui du chemin
de fer de Ceylan. On 'longe quelque temps la mer, puis on
pénètre .dans la forêt, et c'est alors
toute la splendeur d'une végétation tropicale,
le taillis épais et vivace des palmiers de toutes sortes,
des plantes aux feuilles larges et diverses, nuancées
de rouge et de jaune.
On traverse
ensuite la région des bananiers, plantés régulièrement
en longues files parallèles. Près des stations,
de petites maisons de bois apparaissent, bâties sur
pilotis, carrées, avec un toit couvert de feuilles
de tôle et une plate-forme sur laquelle se prélassent
des nègres riant de leur large rire stupide. Toute
cette région leur appartient, on ne voit guère
qu'eux et l'on n’entend parler qu'anglais, et quel anglais
!
On passe à
Matina, sur la rivière Matina, jadis un centre important
pour la culture du cacao, fondé en 1639 et qui avait
été de suite relié à Cartago par
une route de ISO kilomètres de longueur. En 1737 on
comptait 273.138 arbres.
La voie ensuite
s'engage dans la vallée du Reventazon, qui prend naissance
au sud de Cartago, longe le torrent bouillonnant aux bords
escarpés, couverts d'arbres auxquels s'accrochent les
guirlandes de lianes. On quitte bientôt le niveau du
fleuve et on s'élève rapidement ; le chemin
ide fer passe sur de minces viaducs au-dessus de gorges profondes,
au fond desquelles art voit en se penchant les restes des
premiers ponts de fer arrachés par le torrent. Ce sont
des courbes vertigineuses à flanc de coteau, au-dessus
du fleuve qui apparaît comme une ligne blanche dans
le fond de la vallée sauvage, entre les arbres touffus
de la forêt. On devine toute la vie intense du sous-bois,
la multitude d'oiseaux d'Une merveilleuse beauté dont
on connaîtrait, paraît-il ; 725 espèces.
Les palmiers
ont somplètement disparu; de temps à autre,
près de maisons isolées, on aperçoit
les taches vertes d'un groupe de bananiers.
L'Irazu apparaît,
la tête couronnée de nuages, l'air devient hais
et remarquablement pur; nous sommes sur le haut plateau, Le
décor a changé; ce sont maintenant de verdoyants
pâturages rappelant ceux du Jura. Voilà Cartago,
l'ancienne capitale, aux belles rues spacieuses, où
coule une jolie eau limpide, soit au milieu, soit sur les
deux côtés, Elle dort paisiblement au pied du
volcan grandiose qui lui donna souvent de terribles réveils.
On monte jusqu'à
1.600 mètres, à El Alto, pour descendre sur
San José, la capitale actuelle, à 1.135 mètres,
au delà de laquelle surgissent, majestueux, couverts
de verdure jusqu'au sommet, les puissants volcans du Poas
et de Barba.
*
* *
Une
belle avenue mène de la gare au centre de la ville,
laissant à gauche un joli parc bien dessiné,
orné de plantes exotiques, malheureusement délaissé
par le public qui le trouve trop éloigné. Au
milieu de celui-ci se dresse un beau monument élevé
en souvenir de la guerre de 1856 et dû au ciseau du
sculpteur français Carrier-Belleuse. Ce groupe de paysans
transformés en soldats, de femmes vêtues en hâte
d'une simple chemise, d'où jaillit un sein ferme et
harmonieux, symbolise bien la réponse sublime du peuple
costaricien a l'appel de la patrie en danger, l'effort subit
et général pour repousser l'ennemi envahisseur,
Walker, le flibustier nord américain.
La ville de
San José est construite par rues parallèles
et perpendiculaires, avec deux rues principales sillonnées
par des tramways électriques et où se trouvent
un grand nombre de magasins importants et bien approvisionnés,
Les rues sont propres, malheureusement très défoncées
par les pluies. Les trottoirs sont vraiment trop étroits,
surtout dans ce pays où l'on a encore le respect de
la femme, et où la coutume veut que l'on s'efface toujours
du côté de la rue pour la laisser passer, fût-elle
une paysanne.
Le matin,
quand on s'éveille dans cette atmosphère si
pure, avec ce beau soleil colorant le cirque magnifique de
montagnes qui encadre la petite ville, on ne peut s'empêcher
d'un élan de sympathie. San José a un charme
spécial, elle a à la fois le calme d'une petite
ville de province et le mouvement d'une capitale. Elle ne
compte pourtant que 30.000 habitants, mais située au
milieu du plateau central, à proximité de Cartago,
de Heredia et d'Alajuela, reliée par le chemin de fer
aux deux océans, elle est le cœur même du
pays -t s'anime du va-et-vient continuel des passagers qui
la traversent.
Toute la matinée, le mouvement dans les rues est considérable
; les gens sont paisibles, simples et polis. Ils ne gesticulent
pas en parlant, et, s'ils causent avec vous, ils ne s'arrêtent
pas brusquement sur un trottoir, au risque d'entraver la circulation,
pour mieux ponctuer la force de leurs arguments. La tenue
générale est très correcte : les gens
de la campagne sont vêtus à l'européenne,
mais beaucoup conservent l'habitude de marcher pieds nus.
Ils sont la plupart d'une bonne taille, sains et robustes,
le regard franc, la physionomie ouverte. Ils ont toujours
avec eux leurs alforjas, ce sac spécial au pays et
extrêmement pratique. Il est fait de deux grosses sacoches
en cuir épais avec une poignée, et reliées
par deux larges courroies en cuir. A cheval ils le placent
sur leur sellé, une sacoche pendant de chaque côté;
à la ville, ils le portent par les poignées
ou le suspendent sur l'épaule par l'une des courroies,
ou bien encore, lorsqu'il est trop lourd, ils placent une
sacoche Sur leur dos et l'autre sur la poitrine en se servant
des courroies comme de bretelles.
Les femmes
passent nombreuses; souvent jolies, elles sont toujours gracieuses
avec leurs cheveux bien coiffés et leur taille charmante
enroulée coquettement dans de grands châles de
soie aux couleurs chatoyantes. Les yeux noirs ou bleus sont
vifs, les traits délicats, la peau est très
blanche, l'ovale du visage très pur. Beaucoup de jeunes
filles s'appliquent même à relever encore la
fraîcheur de leur teint et la vivacité de leurs
yeux par un maquillage malheureusement inhabile et souvent
trop abondant.
Dans la' journée,
tout le monde fuit l'ardeur du soleil ou les averses torrentielles
pendant la saison des pluies. Le soir, on se promène
devant les boutiques brillamment éclairées,
au parc central et au parc Morazan où joue deux fois
par semaine une très bonne musique militaire de soixante-cinq
exécutants, organisée et dirigée avec
beaucoup de zèle et de succès par M. Jean Loots,
premier prix du Conservatoire de Bruxelles.
Debout dans la rue, des jeunes gens causent de longues heures
avec des jeunes filles accoudées sur le rebord des
fenêtres.
Sauf pour quelques bureaux ou les magasins nouvellement édifiés,
toutes les maisons sont basses, à un seul étage,
à cause des tremblements de terre, construites en briques
ou avec des adobes faits de terre battue mélangée
de paille hachée. Elles sont vastes, avec le patio
espagnol et son petit bassin' entouré de fleurs et
d'arbustes. Elles ont toutes une salle de bains ou de douches,
cimentée ou carrelée. Cet usage fort ancien
existait bien avant l'arrivée des Yankees que l'on
prend 'trop volontiers pour les seuls dispensateurs du confort
et de l'hygiène. Par contre, les hôtels laissent
à désirer et il est question de former une société
costaricienne pour la construction et l'aménagement
d'un hôtel répondant davantage aux exigences
actuelles des voyageurs.
*
* *
De
différents côtés, au-dessus du plan uniforme
des maisons, s'élèvent des édifices importants
: la bibliothèque, le musée où sont réunies
d'intéressantes collections d'antiquités costariciennes
classées avec beaucoup de soin et d'ordre par le secrétaire
actuel don Anastasio Alfaro ; la cathédrale, l'évêché
et le séminaire, le palais du gouvernement où
se trouvent les différents ministères, le bureau
de Statistique, que l'on peut citer 'comme modèle,
sous la direction de don .Manuel Ara¬gon, et la salle
du Congrès ornée des portraits de tous les présidents
de cette république, la fabrique nationale de liqueurs,
l'hôpital et la Banque de Costa Rica. Rappelons en passant
que Costa Rica fut le premier pays de l'Amérique Centrale
à établir une banque en 1857.
Actuellement, il
y a quatre banques principales placées sous le contrôle
de l'État : Banco anglo costarricense au capital de
1.690.000 colons, Banco de Costa Rica 2.000.000 colons, Banco
Mercantil de Costa Rica 2.250.000 colons, Banco Internacional
de Costa Rica 4.000.000 colons. Outre ces quatre banques d'émission,
il existe quelques banques privées, la plupart fort
sérieuses. Le taux de l'intérêt reste
malheureusement très élevé ; pour les
prêts il varie de 9 à 12 p. 100 par an et parfois
jusqu'à 18 et 24 p. 100 dans les époques de
tension. Par contre, pour les dépôts les banques
donnent ; à trois mois 2 p. 100 et à six mois
4 p. 100, à un an 5 et 6 p. 100.
Accompagné
du général Romin, un ancien officier belge,
auquel le Costa Rica doit l'organisation de l'armée
et de la police, leur discipline et leur bonne tenue, j'ai
visité la Peniteneiaria, une nouvelle prison
bâtie sur une éminence un peu en dehors de la
ville. C'est un bel édifice solidement construit, avec
un système central de surveillance, et où tout'
a été calculé avec soin pour l'hygiène
générale et la propreté des détenus.
Tous les couloirs sont carrelés et chaque cellule a
son water-closet à siphon et un lavabo.
Dans les casernes
que nous avons parcourues ensuite, 'On retrouve ce même
souci de l'hygiène, de la propreté et de l'ordre.
En principe, tous les citoyens de la République doivent
le service militaire de dix-huit à cinquante ans; mais
en pratique, seuls, les jeunes gens de la campagne sont appelés
tour à tour à passer deux mois dans les casernes
où on leur donne une sommaire instruction militaire.
Vifs et intelligents, ils se débrouillent très
vite, et ces deux mois d'exercices sont suffisants dans ce
pays paisible où, comme le disait avec fierté
M. le Ministre des Affaires étrangères, il y
a plus d'instituteurs que de soldats.
On donne en effet
un soin tout particulier à l'instruction publique non
seulement à San José, mais dans tout le pays,
où le moindre village est doté d'une école
primaire, et les agglomérations plus grandes d'un lycée.
L'enseignement secondaire est également très
bien organisé ; on en a même peut-être
trop élevé le niveau ou chargé les programmes,
et cela peut devenir un danger.
L'école
des jeunes filles, l'Escuela superior de Senoritas,
est fort bien installée dans un vaste bâtiment
avec des salles claires et bien aérées. L'uniforme,
comme il convient, est simple mais gracieux : une jupe bleu
foncé, une chemisette blanche avec des raies bleues,
un chapeau de paille noire à larges bords, rehaussé
d'un ruban jaune.
Pour les jeunes
gens, ils ont le lycée.
En face se trouve
l'Escuela normal. Ce sont deux édifices importants
; construits en pierres de taille apportées de Cartago,
i.ls étaient destinés par le président
qui les avait fait édifier à servir de maisons
de correction. L'instruction et l'éducation données
dans ces mêmes locaux en ont rendu l'affectation primitive
inutile. Là encore les salles sont vastes, avec de
larges fenêtres laissant pénétrer l'air
et la lumière. Il y a des bains, des lavabos, une piscine,
d~ l'eau filtrée. Le cabinet de physique est fort bien
installé et les professeurs s'efforcent surtout de
donner une instruction pratique et expérimentale. L'on
a créé aussi une classe de travaux manuels,
et cette innovation peut ponter des fruits très utiles
en écartant certains jeunes gens des professions libérales,
en leur permettant de se faire une situation plus en rapport
avec leur condition, plus nécessaire à leur
vie, en diminuant quelque peu la quantité formidable
de medicos et de licenciados.
Parmi tous
ces édifices élevés dans la petite capitale
de Costa Rica, ceux qui lui font le plus d'honneur sont le
théâtre et l'asile Chapuis. Le théâtre
est non seulement le plus beau de l'Amérique Centrale,
mais il pourrait occuper la première place dans beaucoup
de grandes villes, d'Europe. La façade principale avec
ses grandes baies encadrées de fines colonnes ioniques
est d'un bel effet. Le vestibule, orné de colonnades
et de statues, flanqué d'une buvette à droite
pour les messieurs et d'une à gauche pour les dames,
donne accès sur un double escalier, peut-être
un peu trop chargé de dorures. Celui-ci débouche
sur le foyer aux vastes proportions, décoré
de grandes glaces et de fines boiseries qui encadrent de belles
fresques dues à un artiste italien.
Malheureusement
les troupes de passage sont rares; les 7 millions de francs
que ce théâtre a coûté ne sont pas
en rapport avec les besoins de San José. Il fallut
pour les payer mettre un impôt spécial sur les
exportations du pays et il semble qu'une telle somme eut pu
être plus avantageusement dépensée en
dotant la capitale d'une bonne eau potable ou la République
de meilleures voies de communication. Mais je sais que ces
choses sont partout discutables et que, selon les lieux et
selon les circonstances, pour amener la création des
unes ou des autres on peut commencer par les premières
ou par les secondes.
Quant à
l'asile Chapuis, il mérite le titre d asile modèle,
tant son installation est bien comprise. Le salon de réception
possède un remarquable parquet en marqueterie exécuté
avec soin par les ouvriers du pays. Il est fait de cèdre
et d'acajou dont les essences abondent à Costa Rica.
Tout le reste du bâtiment est à l'avenant ; les
corridors, les salles, les cuisines, tout est d'une propreté
irréprochable.
L'éclairage,
qui est obtenu par le haut, est à la fois doux et bien
distribué. On compte environ 35 p.100 de guérisons.
Les ma1ades ont de grandes cours entourées de galeries.
Les aliénés paisibles sont tous occupé
à des travaux, les femmes à la lessive, les
hommes au jardinage. Le jardin joliment dessiné a des
allées bien entretenues, bordées de haies de
rosiers.
L'asile porte
le nom du curé Chapuis qui, m'a-t-on dit, fit don de
tout le terrain sur lequel est bâti San José
ainsi que de la Savane, vaste plaine aux confins de la ville,
à laquelle aboutissent les, tramways et où les
Jeunes gens peuvent se livrer à tous les sports en
face d'un panorama admirable.
*
* *
De
tous côtés, dès que l'on sort de la capitale,
s'alignent en files régulières les plantations
de café. Ce fut pendant longtemps, avant, la culture
des bananes, la grande et unique richesse du pays. Le premier
plant de café fut planté en 1796, importé
de la Havane ou de 'la Martinique par Francisco Xavier Novarre.
Mais ce n'est qu'à partir de 1840 que les plantations
commencèrent à .se développer, lorsque
le gouvernement prit l'initiative .de mettre en vente certains
terrains municipaux, avec la condition expresse qu'ils seraient
plantés de caféiers. Les pieds sont disposés
en longues allées, à un intervalle de 2 mètres
à 2 m.50 l'un de l'autre. On peut faire une première
petite récolte au bout de trois ans. Par la suite chaque
arbuste produit environ 450 grammes par récolte. Une
plantation soignée donne une moyenne de 12 à
15 quintaux, parfois 18 et 20 par manzana, c'est-à-dire
par 70 ares environ.
Aujourd'hui
on évalue à 30.000 hectares la superficie des
plantations de café réparties entre 250 propriétaires
environ, qui exportent annuellement de 14 à 15 millions
de kilogrammes. En 1905, année exceptionnelle, il a
été exporté 18.047.539 kilogrammes représentant
une valeur de 19.420.820 francs, et en 1997, 17.264.482 kilogrammes.
Le beneficio
(installation mécanique) le plus important test installé
à la porte de San José et appartient à
une maison française de Bordeaux, H. Tournon et Cie.
Ce fut elle qui, sous la firme Le Quellec, vers 1860, fit
les premiers voyages avec des voiliers dans le but d'importer
en Europe les cafés de Costa Rica. C'est elle qui,
la première, eut l'idée de traiter les cafés
comme on les traite à Porto Rico et à la Jamaïque.
Alors qu'avant 1880 le café de Costa Rica, mal préparé,
figurait parmi les sortes inférieures, il vient aujourd'hui
en tête des sortes les plus fines et se consomme presque
exclusivement à Londres.
La préparation
du café, telle qu'elle se pratique ici, comporte deux
opérations principales, la partie humide et la partie
sèche. Une eau courante transporte les baies à
une première machine, despulpador, décortiqueur,
qui enlève la première enveloppe extérieure.
Le grain toujours charrié par l'eau est ensuite déversé
dans' des canaux en briques à (ciel ouvert divisés
en compartiments. Le café par sa pesanteur tombe, et
Ia grosse enveloppe est emportée par le courant. Il
est ensuite étendu au soleil dans de grandes cours
cimentées où on le laisse jusqu'à ce
qu'il soit complètement sec. Un appareil le débarrasse
alors d'une seconde 'enveloppe qui a l'aspect du parchemin.
Enfin le pulidor, composé de deux cylindres
à surface rugueuse marchant en sens inverse, lui enlève
une petite pellicule (épisperme) qui recouvre chaque
grain. Un classificateur trie le café selon la grosseur
et la forme en première deuxième et troisième
qualités. Certaines fèves ne donnent qu'un seul
grain rond, c'est ce qu'on appelle le caracolillo.
Le cours moyen
du café de Costa Rica est au Havre :
Sans être lavé. . . . . de 78 à 81 fr.
le quintal
Lavé. . . . . . . . . . . . de 82 à 89 _ _ _
_ _ _
à Londres et à Hambourg de 75 francs à
81 fr. 25, les 50 kilogs, environ. Le droit d'exportation
sur le café est de 1/2 centavo de colon, soit 0 fr,
036.
*
* *
Tout le plateau
est ainsi cultivé jusqu'à Hérédia
et Alajuela, capitales des provinces du même nom, que
je suis allé visiter en compagnie de mon ami don Roberto
Brenes Mesen, le jeune et intelligent sous-secrétaire
à l'Instruction Publique. Nous nous rendons à
Hérédia, sur ces petits chevaux du pays, qui
ne payent pas de mine, mais qui sont d'une résistance
extraordinaire et dont l'allure spéciale, l'amble,
permet de rester de longues heures en selle sans se fatiguer.
Nous suivons la grande route carretera de Cartago
à Puntarenas, ouverte aux premiers temps de l'Indépendance,
car ici tout date de cette époque, rien,pour ainsi
dire, n'ayant été fait par les Espagnols.
Tout le long
du chemin, on aperçoit à chaque instant, un
peu en retrait de la route, de petites maisons isolées,
flanquées d'un auvent, entourées d'un jardin
planté de bananiers et de cannes à sucre. La
propriété est extrêmement divisée.
Chacun a son champ, son verger, sa modeste plantation de café,
un cheval, une paire de bœufs avec son chariot aux roues
pleines, toujours propre et peint dé couleurs vives.
Tout autour de la maison picorent de nombreuses volailles,
grognent de gros porcs noirs. Dans de telles conditions, une
révolution n'est certes pas à craindre.
En passant,
je remarque un détail caractéristique des mœurs
paisibles des habitants. Sur les murs sont encore collés
les placards bleus des dernières élections «
Viva Jimenez », et, près d'une ferme, quelques
canards blancs barbotent dans la boue, les ailes encore bleutées
d'un maquillage temporaire appliqué par un jiméniste
enthousiaste. Heureux pays où les passions politiques
se manifestent de cette façon amusante et aimable.
Heredia, à
l'époque de sa, fondation, en 1751, comptait à
peine cent maisons, la plupart des simples huttes. Grâce
à la fertilité de son sol et à son climat
excellent elle s'est rapidement développée au
détriment de sa voisine et rivale, la ville de Barba,
l'une des plus ancienne, du pays. Elle compte aujourd'hui
7.000 habitants, possède plusieurs églises,
un marché couvert fort bien approvisionné et
un lycée très renommé. M. Brenes Mesen,
qui en fut le directeur pendant plusieurs années, voulut
bien me fournir d'intéressants détails sur l'instruction
publique à Costa Rica qu'il connaît parfaitement
et à laquelle il a rendu de réels services;
il me dit les difficultés qu'il rencontra au début,
sa lutte pour faire accepter le développement intelectuel
de la femme. On craignait qu'avec l'instruction elle ne s’émancipât
trop, alors qu'il voulait seulement la rendre plus apte à
gagner sa vie, la mettre en: garde contre le danger qui existe
partout pour elle et plus encore dans ces pays tropicaux.
A ce sujet
il me rappelait ce sage proverbe castillan :
Entre
santa y santo,
Pared
de cal y canto.
« Entre
une sainte et un saint, il faut un mur de aux et de pierre.
»
Heredia
est le grand centre de la vente du bétail. Un marché
s'y tient tous les mercredis et j'y ai vu de fort beaux animaux.
Beaucoup sont élevés dans la république
même, mais une grande quantité est importée
du Nicaragua pour être engraissée ensuite dans
le pays. En effet, il s'en faut de beaucoup que la production
soit en rapport avec la consommation locale, puisqu'il manque
en général de 12.000 à 15.000 têtes
de bétail par an.
Un novillo
maigre vaut de 30 à 40 colons, un gras de 60 à
70 colons. Le bétail de boucherie se vend environ 18
centavos de colon le kilog ; un novillo gras donne
environ 350 kilogs.
Un peu à
l'ouest se trouve Alajue1a reliée à San José
par une ligne de chemin de fer de 21 kilomètres. Elle
compte environ 5.000 habitants. Jadis très prospère
à cause de sa situation intermédiaire sur la
route du Pacifique, elle est quelque peu déchue. Elle
renferme pourtant de beaux édifices, le cuartel construit
par le célèbre président, le général
Tomas Guardia, l'Institut national et sa cathédrale
avec une coupole immense. Un essai intéressant y a
été fait : la création d'une école
professionnelle de jeunes filles où celles-ci apprennent
à fabriquer des chapeaux de panama avec une plante
qui pousse dans le pays et que l'on appelle tica.
En face de
la gare, au milieu, d’un jardin, se trouve une satue
élevée à l'héroïque enfant
d'Alajuela, au soldat Juan Santa Maria. Durant la guerre de
1856, l'armée du général Joaquin Mora
avait poursuivi le flibustier Walker jusqu'à Rivas,
dans le Nicaragua, près du lac de Granada. Walker s'était
emparé d'un édifice important appelé
le Méson de guerra, d'où il dirigeait
un feu mortel sur les soldats de Costa Rica. Sans artillerie
de siège, on ne pouvait songer à la reprendre,
il fallait l'incendier, mais pour cela on 'manquait de projectiles.
Voyant la nécessité de recourir à un
moyen extrême, le général en second, don
José Maria Cafias, se tourna vers ses troupes : «
Mes enfants, leur dit-il, y a-t-il parmi vous un brave qui
veuille risquer sa vie pour mettre le feu au Méson
et sauve ; ses compatriotes? »
Un soldat sortit
du rang, Un Indien. Il dit simplement : « J'irai, mon
général, mais je vous demande de ne pas oublier
ma pauvre mère. » A la tombée de la nuit,
le feu prit au Méson. Une balle frappa au
bras Santa Maria qui courait, une torche à la main
; de son 'autre bras il reprit la torche et courut mettre
ailleurs l'incendie jusqu'à ce qu'une autre balle l'étendît
à terre, mort. Les flibustiers affolés S'enfuirent
et la victoire resta à Costa Rica.
*
* *
Jadis,
avant que le chemin de fer de l’Atlantique ne fût
construit, presque tout le trafic de Costa Rica se faisait
par Puntarenas, sur le Pacifique, Les bateaux venant de San
Francisco et les grands voiliers d'Europe doublant le cap
Horn apportaient leurs marchandises à ce port. Elles
étaient ensuite transportées par chemin de fer
jusqu'à Esparta où s'arrêtait le premier
tronçon de la ligne del Pacifico, puis par chars à
bœufs jusqu'à Orotina, point terminus de l'autre
tronçon partant de San José. Cette ligne n'a
rien à envier à celle de l'Atlantique pour la
beauté des paysages, l'audace de certaines œuvres
d'art. On traverse deux profonds barrancas aux bords
tapissés de verdure, puis on suit quelque temps le
faîte de la vallée du Rio Grande. La végétation
est moins abondante sur ce versant. Aux abords de la ville,
sur le plateau, ce ne sont que cafetales ; ensuite
viennent quelques rizières, puis la forêt où
l'on exploite une grande quantité de bois, cèdre,
guanacaste. A la Balsa, à trois heures environ de San
José, un aimable Français, M. Vidal, a installé
près de la voie du chemin de fer une scierie mécanique
qui fonctionne fort bien. De Orotina à Esparta la route
est large, bien tracée, mais les pluies torrentielles
en rendent l'entretien fort difficile. Ici les maisons sont
plus clairsemées, d'immenses territoires restent inexploités.
Les marchandises sont amenées d'une gare à l'autre
par de longues files «le chariots, au pas lent de leurs
bœufs, ou à dos de mules qui trottinent gaiement
par bandes de huit à dix, surveillées par deux
arrieros. Près d'Esparta s'étendent
de vastes prairies où paissent de nombreux bestiaux.
Dans tout ce district proche du Guanacaste l'activité
se porte sur l'élevage. Comme je l'ai dit, on l'importe
du Nicaragua pour l'engraisser, puis l'expédier par
terre au marché de Hérédia, Ce trajet
nécessite quatre ou cinq jours.
On passe le Rio
Barranca sur un solide pont en fer, construit par une compagnie
belge, et l'on débouche bientôt sur la mer qu'on
longe sur une étroite bande de sable jusqu'à
Puntarenas, le port principal de la côte du Pacifique,
qui s'étend sur une longueur de 470 kilomètres.
En 1875, ce port recevait la visite de 21 navires, dont 5
français, mais aujourd'hui on n'y voit plus jamais
notre pavillon. En 1905 les entrées de navires furent
de 71 avec 142.327 tonnes et les sorties de 70 avec 141.114
tonnes. Ses douanes, de 1856 à 1871, rapportèrent
1.350.697 piastres, de 1871 à 1876, 3.346.740 piastres,
et durant les six, premiers mois de 1910, 304.207,83 colons.
Le tronçon
qui manquait vient d'être enfin achevé et la
capitale est maintenant reliée directement au Pacifique
par une voie ferrée. C'est une grande joie pour les
Costariciens, d'autant plus grande qu'ils ont attendu davantage.la
fin de ces travaux dont l'achèvement s'est fait si
longtemps désirer.
C'est
en effet le 25 mars 1879 qu'un décret autorisait la
construction du chemin de fer del Pacifico. Le projet devait
relier San José avec le port de Puntarenas en passant
par Esparta. En vertu de ce décret, le gouvernement
nt construire la section entre Puntarenas et Esparta sur une
longueur de 21 km. 726 pour la somme de 1.900.000 colons (environ
3.056.000 francs).
Malheureusement,
des influences politiques firent abandonner ce premier projet
et, au lieu de Puntarenas, on choisit comme point terminus
de la ligne le, petit port de Tivives. Le 6 août 1897
le Congrès approuvait le contrat passé entre
le ministre de Fomento et don John S. Casernent pour la construction
du chemin de fer al Pacifico entre San José et Tivives.
C'est en vertu de ce contrat que furent construits les 69
kilomètres qui séparent San José et Orotina,
autrefois Santo Domingo de San Mateo, et qui coûtèrent
6.744.058,74 colons.
Mais le pays, à
ce moment, subit une crise et le gouvernement dut résilier
le contrat. Le 22 novembre 1905 le Congrès revenait
au projet abandonné et accordait au pouvoir exécutif
la faculté de continuer les travaux entre Orotina et
Esparta, Le gouvernement reprit donc tous ces travaux et construisit,
en partant d'Orotina, 15 km. 200, jusqu'à Las Huacas,
au prix de 615.015,78 colons.
Le mauvais temps,
la rareté de la main-d'œuvre, les difficultés
naturelles à vaincre vinrent une fois de plus arrêter
les travaux en cours. Mais dès le début, on
avait commis une faute grave. Au lieu de pousser les travaux
d'un côté seulement, du côté de
l'océan Pacifique par lequel on pouvait facilement
faire venir le matériel, on voulut commencer à
la fois du côté de Puntarenas et de San José.
Le général Tomas Guardia lui-même regrettait
la lenteur avec laquelle se poursuivait ce chemin de fer al
Pacifico.
« J'avais
conçu la pensée, disait-il au Congrès.
après avoir remis mes pouvoirs à mon successeur,
de me constituer chef de deux mille ouvriers, qui, organisés
militairement, auraient terminé le chemin en moins
de temps qu'on ne t'a calculé en lui consacrant des
ressources considérables, Mon idée était
de supprimer toutes les garnisons militaires, d'emmener avec
moi les chefs et les officiers et de les mettre à la
tête de mes travailleurs. Si ma proposition est agréée,
je puis vous assurer, Messieurs, que jamais je ne me serai
cru plus grand qu'à la tête de mes travailleurs,
ces soldats du progrès, cette année de la civilisation.
»
Le président
éclairé dont le terme vient d'expirer, don Cleto
Gonzalez Viquez, voulut combler cette lacune et relier les
deux tronçons de ligne du chemin de fer qui existaient
sur une certaine longueur à partir de chaque point
terminus. En effet, 79 kilomètres d'un côté
étaient construits entre San José et Cascajal
et de l'autre. 22 entre Puntarenas et Esparta, laissant un
espace d'environ 20 kilomètres pour joindre les deux
tronçons, En juillet 1907, don Cleto obtenait du Congrès
la nomination d'une commission d'ingénieurs pour étudier
et déterminer la meilleure voie de jonction entre les
deux portions de ligne déjà construites, et,
en novembre 1907, le gouvernement confiait la conduite des
travaux à un Américain, M. W. H. Knowlton, ingénieur
principal adjoint au chemin de fer New York Central et Hudson
River.
La reconnaissance
du terrain dura quatre mois, de décembre 1907 à
avril 1908. L'idée première de réunir
Cascajal, près de Las Huacas, et Esparta fut abandonnée
à cause de grandes difficultés topographiques
que présentait ce parcours, et il fut décidé
de relier cette station de Cascajal à la station de
El Roble sur la ligne de Puntarenas à Esparta, à
peu de distance de Punta¬renas. Au lieu de 4.185 pieds
de tunnel, on n'en avait plus que 1.500 et la distanœ
était de 20 p.100 plus courte. Pour que Esparta ne
perdît pas les bénéfices directs du chemin
de fer, on devait reconstruire, mais d'une façon économique,
la ligne déjà existante entre cette ville et
El Roble et dont le mauvais état, les frais de réfection'
avaient pu faire hésiter à la maintenir.
Le gouvernement, ayant approuvé les vues de M. Knowlton,
signa avec celui-ci, le 4 septembre 1908, un contrat formel
qui fut par la suite modifié, le 22 février
1909.
Ainsi tracée,
la ligne, de 19 kilomètres environ, comprenait comme
travaux d'art une coupe importante à Matamoros, un
pont d'une arche de 140 pieds sur la rivière Jesus
Maria, le tunnel Cambalache d'environ 300 mètres de
long, la corniche taillée dans le roc près de
la mer, le tunnel Carballo d'environ 225 mètres de
long, et le pont sur le Rio Barranca de trois arches de 140
pieds chaque. Toutes les pièces pour les ponts ont
été fabriquées à Baltimore par
« The Baltimore Bridge Works », tandis que les
rails ont été fournis par la United States Steel
C°. L'écartement des voies est de l m.20. L'estimation
première des travaux qui figurait sur le contrat était
de 1.069.684 colons, mais cette somme a été
largement dépassée. Les travaux commencés
fin octobre 1908 ne furent terminés qu'en août
1910 et la ligne ne fut mise en exploitation qu'à la
fin de l'année. Malheureusement ces travaux n'avaient
pas été exécutés avec tout le
soin désirable et le trafic fut, par deux fois, interrompu
durant de longues semaines pendant la réfection du
tunnel de Cambalache et la modification de la corniche.
A la suite de l'ouverture
de cette ligne, le mouvement va renaître à Puntarenas
et toute cette partie de la république de Costa Rica,
quelque peu délaissée malgré sa fertilité,
va reprendre un essor nouveau. Le pays tout entier d'ailleurs
profitera de cette union directe de la capitale avec le Pacifique.
Les frais de transport si coûteux vont diminuer, en
même temps que vont disparaître les causes de
dégâts trop fréquents et de retards prolongés
quand les marchandises devaient subir deux transbordements
et les secousses d'un long trajet dans des chariots à
bœufs.
Les touristes aussi
pourront venir en plus grand nombre. Combien se laisseront
tenter par la possibilité d'éviter la route
brûlante et malsaine de Panama, les formalités
d'une douane particulièrement tracassière, tout
en faisant un voyage agréable et pittoresque. Beaucoup
qui reculaient devant la fatigante chevauchée de cinq
heures et la difficulté de conserver ses bagages avec
soi, n'hésiteront plus maintenant à venir de
Panama pour passer une saison à San José et
à Cartago, respirer l'air pur des hauts plateaux au
milieu d'un panorama admirable.
*
* *
La petite
ville de Puntarenas est située au bout d'une péninsule
de sable, entourée par l'Océan et un large estero,
où la pêche et la chasse offrent un passe-temps
des plus agréables, en face de la baie de Nicoya, un
des plus beaux panoramas que l'on puisse voir. La ville s'est
faite pour ainsi dire elle-même, le gouvernement a peu
contribué à son développement. Les rues
sont larges et éclairées à l'électricité,
et le terrain sablonneux a le double avantage d'absorber rapidement
l'eau des pluies et de permettre à chaque maison d'avoir,
en creusant un puits, une très bonne eau potable.
Les habitants
sont au nombre de 5.000 environ, dont 200 Chinois. Le gouvernement
cherche à enrayer leur immigration, considérant
que leur présence est un danger pour la race en même
temps qu'elle est un maigre profit pour le pays, car ils économisent
à outrance et envoient toutes leurs économies
en Chine. Ceux qui partent ne peuvent revenir qu'avec un passeport,
mais la fraude est facile et ainsi ils se renouvellent continuellement.
D'ailleurs le peuple les voit d'un assez bon œil, car
ils sont tous commerçants et ne font pas de concurrence
à la main-d’œuvre, Ils sont plus accueillants
que les commerçants costariciens et accordent plus
volontiers du crédit. En outre, ils maintiennent les
prix et empêchent la surenchère.
Puntarenas a sa
promenade le long de la plage ; elle est asphaltée,
garnie de bancs en ciment et ombragée par une double
rangée d'arbres. A gauche du quai d'embarquement des
passagers et des marchandises est une jetée, avec un
établissement de bains où un haut barrage de
treillis permet de se baigner dans la mer sans crainte des
requins très nombreux en ces parages. L'air y est moins
saturé d'humidité que sur l'Atlantique et la
brise qui se lève tous les après-midi en rend
le séjour très agréable, surtout pendant
la saison sèche, époque à laquelle les
familles de San José descendent à la côte
pour une temporada (une saison).
Avec cette plage
admirable, ce panorama superbe, Puntarenas, en Europe, serait
une station à la mode. Les couchers de soleil et les
clairs de lune y sont magnifiques. Dans le fond du golfe s'estompent
les masses sombres Ides nombreux îlots et tout près
se détachent d'une façon précise les
plus grandes îles de Chira et de San Lucas.
C'est dans cette
dernière qu'est installé le bagne, où
sont envoyés tous les condamnés, car la peine
de mort est abolie à Costa Rica. L'entrée du
presidio est dans le fond d'une baie délicieusement
jolie. Un seul officier, aidé d'un sergent, de trois
caporaux et de trente-trois soldats, y surveille deux cent
cinquante prisonniers, dont soixante-huit homicides, la plupart
Nicaraguens réfugiés ou 0 nègres. Ils
portent comme uniforme une chemise et un pantalon bleu à
bande blanche, mais aucun n'est retenu par des chaînes.
Ils travaillent à travers l'île à des
plantations de maïs et de canne à sucre ou dans
des ateliers de cordonnerie, de menuiserie, jusqu'à
une heure. Ils peuvent ensuite travailler pour eux-mêmes
: ils fabriquent des guitares, des boîtes avec des incrustations
de nacre qu'ils trouvent sur la plage. Le public est admis
deux fois par mois et un médecin vient de Puntarenas
le 1er et le 15 de chaque mois.
Quand j'y
suis allé, c'était un dimanche et la cour du
presidio avait un aspect particulièrement
calme.
Les détenus
se faisaient faire la barbe, couper les cheveux, jouaient
ide la guitare ou de la marimba. Comme me le faisait
remarquer le colonel qui me faisait aimablement les honneurs
du bagne : « Vous voyez, nous avons plutôt l'air
d'être dans la cour d'une hacienda. »
Bien peu cherchent à s'enfuir; mais des sentinelles
sont postées tout autour de l'île, et dans la
mer, les requins se chargent, du reste, de faire bonne garde.
On m'a cité pourtant certain général
vénézuélien qui réussit à
s'échapper trois fois.
De petits
vapeurs circulent régulièrement dans le golfe
et remontent le Rio Tempisque jusqu'à une certaine
distance. Ils relient ainsi au reste de la République
Libéria, la capitale de la province de Guanacaste adonnée
à l'élevage du bétail, et Nicoya, la
ville la plus importante de cette presqu'île de Nicoya
découverte en 1552 par Gil Gonzalez de Avila. Elle
fut habitée jadis par les Mangues ou Chorotegas, les
plus civilisés parmi les Indiens qui habitaient Costa
Rica. C'est là, en effet, que l'on a trouvé
dans des tombes de merveilleux ornements d'or et de céramique,
des objets de jade et d'obsidienne, qui font preuve d'un goût
supérieur et raffiné.
C'est d'ailleurs
en face de cette péninsule, sur là droite du
golfe, près de Manzanillo, que se trouvent au milieu
des montagnes, les riches mines d'or d'Abangarez. Elles appartiennent
à une compagnie américaine qui y a dépensé
environ 2.500.000 francs et y a installé un outillage
de premier ordre pour le traitement de l'or par le cyanure
de potassium. On y exploite plusieurs mines, Tres Amigos,
Tres Hermanos, Boston, Espe¬ranza, et les chiffres donnés
par le conseil d'administration indiquaient que les bénéfices
apparents, de mars à juillet 1909, étaient de
$ 176.934,19, c'est-à-dire environ 884.171 francs.
Mais d'une manière
générale les bénéfices sont beaucoup
diminués par les frais énormes de transport
des marchandises qu'il faut faire venir de Manzanillo au moyen
de chariots à bœufs et qui restent souvent quinze
jours et plus en route. Aussi est-il question d'un projet
de construction de voie ferrée de la « United
Fruit C° » dont le vice-président est aussi
fortement intéressé dans les mines d’Abangarez.
Il s'agirait de construire une ligne de San José, Liberia
et à Punta Culebra, un excellent port naturel sur l'océan
Pacifique. Ce serait certes fort intéressant pour cette
région et aussi pour la riche vallée de San
Carlos, dont le développement est retardé par
le manque de communications.
*
* *
Dans
ces conditions, et par la situation du pays, toutes les aspirations
de Costa Rica ne peuvent donc être tournées que
vers la paix, qui lui permettra de développer de plus
en plus ses ressources naturelles et d'attirer, en lui donnant
confiance, le capital étranger, de préférence
européen, nécessaire à ce développement.
Tout récemment,
le 23 février 1911, le Congrès approuvait dans
toutes ses parties le contrat passé à Londres
le 7 décembre 1910 avec M. Miner Cooper Keith de New
York et qui réglait dans des conditions relativement
avantageuses la dette extérieure de Costa Rica.
La première
dette extérieure de ce pays remonte à l'année
1871, lorsqu'il fit un emprunt de £ 1.000.000, à
6 p.100, garanti par les recettes douanières et les
biens nationaux. L'année suivante, un second emprunt
de £ 2-400.000 fut signé, au taux de 7 p.100,
avec la garantie des impôts établis sur la vente
des liqueurs, des tabacs, sur le café exporté
et sur les recettes du chemin de fer.
Le service
de ces deux emprunts fut suspendu en 1874.
En 1885 un premier
arrangement fut conclu par l'entremise de M. Minor C. Keith.
La somme de £ 4.810.812 à laquelle s'élevait
la dette de Costa Rica, capital et intérêts,
fut réduite à £ 2.000,000, portant intérêt
à 5 p.100. Les nouveaux titres étaient divisés
en deux séries A et B, et il resta convenu que le gouvernement
payerait les intérêts à partir du 1er
janvier 1888 et à la même date formerait un fonds
d'amortissement de 1 p. 100 par payements semestriels. Pour
les intérêts en retard qui se montaient à
£ 649.428 pour le premier emprunt de 1871 et à
£ 1.470.084 pour le second, des titres de la compagnie
du Ferrocarril de Costa Rica étaient émis à
raison de £ 22,10 en actions équivalentes à
100 livres des titres anciens. Les titres des emprunts de
1871 et 1872 devaient être conservés par le Conseil
des Porteurs jusqu'en 1894 comme garantie de l'accomplissement
de cet arrangement.
Le coupon
de janvier 1895 ne fut pas payé et un second arrangement
fut conclu en 1897 par lequel le taux de l'intérêt
était rabaissé à 3 p.100 pour la série
A et à 2 1/2 p.100 pour la série B à
partir du 1er décembre 1897. Les cinq coupons non payés:
furent convertis en certificats à raison de 40 p. 100
de la valeur nominale, formant un total de £ 100.000
payables en vingt ans.
Le service
de la dette se fit régulièrement jusqu'au 1er
avril 1901, mais la hausse du change et la baisse du café
obligèrent le gouvernement à cesser ses versements.
Il proposa aux porteurs différents arrangements dont
aucun ne fut accepté par eux.
En 1905, la
maison Speyer et C°, de New York, faisait part aux porteurs
de Londres du contrat qu'elle avait proposé au gouvernement
de Costa Rica. Les porteurs en eussent accepté les
clauses, mais le contrat jugé inacceptable par la commission
chargée de l'examiner à cause de conditions
offensantes pour la dignité du pays ne fut même
pas présenté à la discussion du Congrès.
Le contrat
liquidait la dette jusqu'au 1er juillet 1905. Avec les intérêts
accumulés, celle-ci s'élevait à la somme
de £ 2.303.656,50 qui se divisait de la façon
suivante :
Capital
des obligations A £ 525.000,00
_
_ _ _ _ _ _ _ B £ 1.475.000,00
Certificat
des intérêts £ 80.000,00
Intérêts
non payés du
1er
avril 1901 au 1er juillet 1905 £ 223.656,50
On
devait émettre pour 11.500.000 dollars d'obligations,
à 5 p.100$ 7.541.144 devaient servir au règlement
de la dette (£ 2.303.656,50), plus la commission des
banquiers (£ 97.500,00) et $ 3.958.856 au payement des
obligations de l'Assainissement de Limon et d'autres fractions
ide la dette intérieure.
Ce ne fut
que quatre années plus tard, sous la présidence
de don Cleto Gonzalez Viquez, qu'un nouveau contrat fut passé
avec la National City Bank, de New York. Comme celui de 1905,
le contrat de 1909 prévoyait l'émission d'obligations
en quantité suffisante (£ 13.250.000) pour le
règlement de la dette extérieure et d'une partie
de la dette intérieure. L'intérêt était
de 5 p.100 et le capital devait être amorti en cinquante
ans.
Le contrat
de 1909 devait liquider la dette, capital et intérêts,
au 1er octobre 1909. A cette époque la dette extérieure
s'élevait à £ 2.527.312,10 et elle eût
été réduite à £ 1.500.000.
Les obligations de l'Assainissement de Limon et du Ferrocarril
al Pacifico devaient être réglées avec
le surplus des nouvelles obligations.
Ce contrat
présenté au Congrès dans une session
extraordinaire en août 1909 fut rejeté et le
président actuel don Ricardo Jimenez, alors président
du Congrès, prit une part prépondérante
dans les débats qui aboutirent à ce rejet. Aussi,
dès son arrivée au pouvoir, celui-ci s'occupa-t-il
spécialement du règlement de la dette extérieure
qui, au 31 décembre 19IO, s'élevait à
£ 3.175.000. Un contrat était conclu à
Londres le 7 décembre 1910 avec M. Minor Cooper Keith,
de New York, et approuvé par le Congrès de Costa
Rica le 23 février 1911.
En voici les
clauses principales :
Le banquier
(M. Minor Cooper Keith) accepte d’aider la République
à subsister à ses dettes extérieure et
intérieure :
Dette extérieure
de la République :
Certificat
représentant les coupons payés £
80.000
Obligations
A à 3p.100…………………...£
525.000
-
B à 2 ½ p.100………………..£
1.475.000
Intérêts
jusqu’au 31 déc. 1910…………..£
513.093
Dette
intérieure :
Obligations
de l'Assainissement de Limon col. 1.013.000 des obligations
nouvelles dans les conditions suivantes :
La République
de Costa Rica fera une émission d'obligations dénommées
« obligations nouvelles or 1911 », jusqu'à
concurrence de £ 1.617.200 ou $ 7.859.592 en monnaie
or des Etats-Unis d'Amérique.
Les
dites obligations seront datées du 1er janvier 1911,
payables le 1er janvier 1958 ou avant si le gouvernement le
désire. Ce remboursement sera fait au moyen d'un fonds
d'amortissement cumulatif, portant intérêts,
payables par semestres, au taux de 4 p.100 les dix premières
années et de 5 p.100 les années suivantes. La
valeur de chaque obligation sera de 100 livres. Les obligations
et les coupons seront exempts de contributions de toutes classes.
Le premier coupon sera payé le 1er juillet 1911.
Afin de protéger
la République et les porteurs d’obligations contre
des émissions excessives, chaque obligation sera légalisée
dans une forme spécifiée avec la signature d'une
corporation, banque ou personne responsable, nommée
à cet effet par Je Banquier, et aucune obligation sans
cette légalisation ne jouira des bénéfices
du contrat ni ne participera aux sécurités données
par celui-ci. Mais toute obligation légalisée
comme il est indiqué sera considérée
dûment émise et participera aux bénéfices
et sécurités ici stipulés.
La République
remettra au Banquier £ 1.617.200 en obligations nouvelles
qui lui serviront en échange pour acquérir et
éteindre les dettes de la République de la façon
suivante :
£
525.000. . . . . . . . . . . Obligations A
£
1.475.000. . . . . . . . . . Obligations B
ainsi que les intérêts arriérés
et les certificats représentant des Coupons non payés
et aussi 1.013.000 colons en obligations d'Assainissement
de Limon et payer les frais nécessités par ces
opérations.
En outre de ladite
somme de £ 1.617.200 en obligations nouvelles, la République
peut émettre des obligations additionnelles jusqu'à
concurrence de £ 382.800. A quelque époque que
la République désire émettre ces obligations
additionnelles, elle doit donner au Banquier l'opportunité
d'acheter celles-ci aux conditions aussi favorables que la
République le désire. Au cas où le Banquier
refuserait de les acheter dans un laps de temps de soixante
jours après avoir reçu l'offre par écrit
de la République pour la vente de ces obligations,
la République aura le droit de les vendre à
d'autres, mais au même prix que celui offert au Banquier.
Devoirs
du Banquier. - Comme il s'entend que le Banquier a obtenu
le consentement d'une grande partie des porteurs des obligations
des séries A et B, une réunion du Conseil des
porteurs d'obligations étrangères sera tenue
aussi tôt que possible à Londres, agissant de
concert avec le représentant de Costa Rica pour accepter
d'une manière formelle les termes spécifiés;
cette acceptation doit être exprimée par écrit
et envoyée au Banquier comme à la République.
En conséquence, l'arrangement une fois approuvé,
le Banquier prendra à sa charge de faire immédiatement
l'échange des obligations anciennes contre les obligations
nouvelles. Les obligations anciennes seront détruites.
Le Banquier pourra établir des agences à Costa
Rica et à l'étranger pour cette transaction,
mais au cas où toutes les obligations de la dette extérieure
et celles de l'Assainissement de Limon ne seraient pas présentées
pour être échangées, le Banquier garderait
en réserve une quantité suffisante d'obligations
nouvelles pour couvrir celles-ci d'après les conditions
sus-énoncées. Le 1er janvier 1913 le Banquier
rendra à la République toutes les obligations
nouvelles qui auraient été conservées
dans ces conditions et qui n'auraient pas servi pour l'échange
avant cette date.
La République
remettra au Banquier tous les documents et renseignements
nécessaires pour faciliter l'admission de ces obligations
à la cote des marchés de New York, Londres,
Amsterdam, Berlin et Paris. Tous les frais afférents
aux arrangements passés pour le service des coupons
ct l'admission à la cote seront à la charge
de la République.
Fonds
d'amortissement. - Pour le paiement des obligations nouvelles,
la République créera un fond d’amortissement
qui égalera le 1 p.100 par an sur la valeur nominale
de toutes les obligations émises. Les sommes reçues
par le Banquier pour le fonds d'amortissement seront employées
par lui ou par la République a 1 achat au pair des
obligations nouvelles offertes sur les marchés publics.
Les tirages
au sort pour le remboursement des obligations: se feront à
New-York deux fois par an à partir de mai 1912.
La République
a le droit d'augmenter sans limites le fonds d'amortissement
avant ou après le 1er Janvier 1912.
Garantie des obligations
nouvelles. - Le capital et les intérêts des obligations
nouvelles, le paiement du fonds d’amortissement et les
frais que comporte le service des obligations et des intérêts
seront repris en première ligne sur les recettes douanières
de la République jusqu’à ce que ces obligations
nouvelles soient complètement payées. Ces sommes
seront versées à M. John M.Keith résidant
à San José de Costa Rica.
Le Banquier
doit toujours avoir, quand se fait Je paiement semestriel
des intérêts, au moins les cinq sixièmes
'de la somme correspondant au paiement suivant, sans compter
le fonds d'amortissement.
Si la République
manquait pour un motif quelconque pendant trente jours à
l'accomplissement de ses engagements, le Banquier aurait le
droit d'exiger et la République serait obligée
d'accepter l'établissement d'une agence douanière
qui serait une compagnie, une banque ou un individu responsable,
désigné par le Banquier. Cette agence douanière
aura l'autorisation exclusive de créer et émettre
des certificats de douane dans la forme stipulée à
l'annexe C.
« Par
la présente, il est certifié que la quantité
de colons...(de valeur non inférieure à 46 l/2
centavos monnaie «les États-Unis) a été
payée par-devant l'Agence douanière établie
par le contrat du règlement de la dette de la République
de Costa Rica signé le 7 décembre 1910, et ce
certificat est admissible pour ladite somme en paiement de
tout droit dû à la République pour les
importations et exportations. »
La République
convient que tous les droits douaniers, reçus ou payés
pour les importations et exportations, seront payables seulement
avec ces certificats pour leur valeur nominale à partir
du jour où sera établie Agence douanière.
Ces certificats seront émis par émissions successives
de deux cent cinquante mille colons et devront, pour être
valables, être légalisés par le Ministre
des Finances ou telle personne désignée à
cet effet par le Président de la République.
L'Agence douanière devra donner une caution de $ 100.000
or, fournie par une compagnie de cautionnements offrant toutes
les garanties de responsabilité, incorporée
d'après les lois d'un des États des États-Unis
et possédant un capital au moins égal à
un million de dollars.
Des quantités
reçues par la vente de ces certificats douaniers, l'Agence
douanière devra retenir et remettre promptement 1 au
Banquier, chaque mois, les sommes nécessaires au paiement
des intérêts, au fonds d'amortissement et aux
frais occasionnés par le contrat, et dans le temps
stipulé pour ces paiements par le présent contrat.
Au cas où une quantité d'argent suffisante ne
serait pas reçue et remise par l'Agence douanière
pendant n'importe quel mois, la République s'engage
à remettre immédiatement et directement des
fonds suffisants pour couvrir la différence et éviter
un manque quelconque de paiement des intérêts,
du fends d'amortissement et de toute autre de ses obligations
prévues par le contrat. L'Agence douanière fournira
à la République des renseignements complets
sur l'émission des certificats douaniers et permettra
à l'officier du gouvernement, nommé par le Président,
d'inspecter ses livres et les comptes ayant trait à
l'émission et à la vente de ces certificats.
Le Congrès
a autorisé également le pouvoir exécutif
à négocier un emprunt à peu près
égal au montant de la dette intérieure actuelle
à un taux plus bas pour amortir cette dette et obtenir
pour la nation un rabais considérable du montant des
intérêts et des conditions d'amortissement qu'elle
pourra facilement supporter.
Le règlement
de cette dette intérieure est d'une importance vitale
pour le pays, car tout l'argent (10 000 000 de colons) que
le gouvernement rendrait aux banques et à des particuliers
serait mis en circulation et cette abondance d'argent aurait
pour conséquence immédiate la baisse du taux
d'intérêt. Or, celui-ci est actuellement très
élevé (12 p.100) et entrave singulièrement
le développement des ressources du pays.
Celles-ci sont
considérables et variées. Le climat tempéré
et parfois même froid dans la partie montagneuse, sur
le plateau central, est chaud dans les terres basses, près
des côtes de l'Atlantique et du Pacifique, mais on ne
peut dire qu'il soit absolument malsain, car quelques précautions
d'hygiène suffisent à écarter tout danger
qui, dans ces régions, provient trop souvent pour les
étrangers de l'usage immodéré des boissons
alcooliques.
Le
pays, essentiellement agricole, est malheureusement retardé
dans son essor par la rareté de la main-d’œuvre
: il pourrait nourrir des millions d'habitants et il n'en
compte que 440 000 ! Une grande partie de son territoire est
encore inexploitée. Indigènes et étrangers,
tous se sont portés le long de la ligne de chemin de
fer. De Puerto Limon à Puntarenas, seule une étroite
bande de terre est mise en valeur et des milliers d'hectares
aptes aux cultures les plus variées attendent les capitaux
étrangers. Les Américains, les Allemands y ont
déjà d'immenses intérêts, et il
est à regretter que les capitaux français semblent
vouloir ignorer ce pays.
En
effet, ceux-ci sont peu importants à Costa Rica où
d'ailleurs nos compatriotes sont en nombre restreint. On n'en
compte qu'une centaine disséminés dans tout
le pays, mais pourtant quelques-uns ont su se créer
une situation fort avantageuse avec des plantations de café,
de cacao de bananes ou dans des banques.
Au reste, la République
de Costa Rica n'est pas le pays des grandes entreprises ;
le manque de charbon, la rareté de la main-d'œuvre,
le nombre restreint des consommateurs écartent actuellement
la possibilité de manufactures importantes. Elles seraient
obligées de se consacrer à l'exportation et
se trouveraient dans des conditions défavorables pour
lutter avec la concurrence. Par contre, pour subvenir aux
besoins mêmes du pays, quantité de petites industries
sont à créer, dans lesquelles un capital relativement
restreint pourrait être engagé, semble-t-il,
avec une entière sécurité.
En outre,
la province de Guanacaste dans presque toute son étendue,
les plaines de San Carlos et des Guatusos, au nord de la province
de Cartago, présentent d'excellents terrains pour l'élevage
du bétail, et dernièrement le gouvernement costaricien
a promulgué une loi destinée à favoriser
l'élevage national par des primes accordées
aux importateurs.
Malgré
la cherté de la, vie, due en gran.de partie aux droits
de -douane qui viennent s'ajouter aux frais élevés
de transport des marchandises, le mouvement commercial est
très actif. La moitié du commerce total revient
aux États-Unis, grâce à leurs communications
fréquentes et rapides avec les différents ports
du territoire. La France ne vient qu'au quatrième rang,
après l'Angleterre et l'Allemagne. Nous vendons plus
de la moitié des vins et liqueurs consommés
il Costa Rica, c'est-à-dire près de 500.000
francs, Mais ce commerce est presque entièrement aux
mains d'intermédiaires espagnols et allemands, par
suite de l'absence de maisons françaises d'importation.
Il est vraiment regrettable de penser qu'il n'y a pas clans
toute la République un seul comptoir français
vendant exclusivement des produits français.
Les négociants
de France auraient, semble-t-il, avantage à se syndiquer
pour la vente des articles de Paris, des vins et liqueurs,
huiles et conserves, de la parfumerie, des produits pharmaceutiques
et de maints autres articles pour lesquels notre supériorité
est universellement reconnue.
Commerce
extérieur général du Costa Rica
(en
francs)
Année.
Importations.
Exportations.
Totaux
1901.
. . . . . . . 20.317.012 26.284.357
46.601.369
1903.
. . . . . . . 25.247.535 36.500.905
61.748.440
1905.
. . . . . . . 24.410.264 41.911.482
66.321.746
1907.
. . . . . . . 38.416.440 46.920.252
85.336.692
1909.
. . . . . . . 31.535.167 42.031.555
73.566.722
Commerce
de la France avec le Costa Rica
(en
francs)
Importation
française Exportation
du Costa Rica
au
en
Costa
Rica
France
Année
1901.
. . . . . . . 1.042.125
587.775
1903.
. . . . . . . 1.582.670
860.370
1905.
. . . . . . . . 1.249.105 533.630
Pourcentage
des Importations des principaux pays
1905
1906
1907 1908
Etats-Unis
d’Amérique. . . . . . 46,88% 48,49%
44,93% 46,50%
Angleterre.
. . . . . . . . . . . . . . .19,73% 21,71% 23,28%
22,78%
Allemagne.
. . . . . . . . . . . . . . .12,90% 11,20% 10,83%
15,05%
France.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . .5,24% 4,99%
4,98% 7,77%
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